Il a tout ce qu’il faut pour réussir dans tout ce qu’il entreprend. L’argent, le relationnel, le courage de prendre des initiatives porteuses. Si Mathurin de Chacus a pu réussir dans les affaires, son avènement dans le milieu footballistique se révèle une réussite en pointillés.
C’est difficile de prévoir un échec pour le président de la Fédération Béninoise de Football (FBF), quand on sait que, l’élément détonateur du sport roi, reste d’abord le financement, c’est-à-dire, l’espèce sonnante et trébuchante. Et ce n’est pas pour rien qu’on parle aujourd’hui de l’industrie du football. Une expression qui peine à devenir une réalité au Bénin.
A ce niveau, le président de la Fédération Béninoise de Football et président de l’emblématique club, les Dragons de l’Ouémé, est loin d’être un mécène. Lui qui détient un bilan moins glorieux, quand on jette un regard critique sur les performances relevant de son management dans le monde du football. Entre le président de Chacus et le football, ça tend vers une histoire de » je t’aime, moi non plus « . Et c’est le cœur serré et meurtri qu’on en parle, puisqu’on ne lui aurait jamais souhaité un sort si pâle. L’homme semble bien aimer le sport, en particulier le football. Rien qu’à voir ce qu’il y investit. Il aime aussi relever les gros défis de sa seconde passion qu’est le football. Mais l’aventure est moins glorieuse.
Un management suicidaire
A commencer par son management à la tête des Dragons de l’Ouémé. Un passage de vache-maigre, où le club le plus titré du Bénin enchaîne les contre-performances. Conséquence sans doute de la gestion très peu coordonnée de ce club qui a fait par le passé la gloire du football au plan national et international.
Au sein de l’encadrement, ça grogne et murmure dangereusement. Mais personne ne veut en parler à haute voix au risque de mettre sa tête à prix. Le pouvoir de l’argent (bien que pour financer une cause noble), est aussi capable de nuisance. Depuis des décennies, Dragons FC peine à reprendre la couronne du championnat d’élite national. Ce qui se passe à ce niveau relève, non d’un mythe, mais d’une éclatante incapacité managériale.
Depuis 18 ans, les Dragons de l’Ouémé courrent derrière un titre. L’avènement du président de Chacus, il y a environ 15 ans ne change pas la donne. L’homme « providentiel » entreprend des investissements colossaux, mais les résultats ne suivent pas. Les recrutements successifs de joueurs et la mise en place de staffs techniques réguliers et irréprochables ne portent pas leurs fruits. C’est à croire qu’il y a une malédiction qui suit le président des Dragons de l’Ouémé qui semble se laisser aller au triste sort. Un tel investissement pour un non résultat, et sans visiblement la moindre gène, reste tout de même surprenant. Certains parlent déjà d’une gestion scabreuse. On note aujourd’hui des camps. Une ambiance délétère qui ne favorise pas véritablement la cohésion et la discipline de groupe. Beaucoup de mécontents, de marginalisés et même des prétentieux qui sont prêts à arracher le flambeau au président de Chacus devenu presque « persona non grata » au sein des Dragons de l’Ouémé. Une véritable guerre de tranchées s’installe entre les supporters et les dirigeants. En tant que père de famille, Mathurin de Chacus se lance dans un silence coupable, pendant que la situation s’empire davantage.
L’argent, et pourtant…
Les faits semblent donner raison à ceux qui pensent que l’argent ne fait pas tout. Dès lors, on peut se poser la question de savoir ce qui manque au président Mathurin de Chacus pour vaincre le signe indien. C’est un principe établi qu’à côté de l’argent, il faut des idées, une planification, pour des résultats à court, moyen ou long terme. Le président des Dragons de l’Ouémé est-il mal entouré au point où ses investissements se révèlent infructueux ? Se met-il dans la posture d’un chef suprême ou une autorité qui a tendance à faire passer d’abord ses idées que de se préoccuper d’une oreille attentive ? A-t-il le temps nécessaire pour se mettre véritablement au service de son club ou a-t-il opté pour une délégation de pouvoir qui se révèle suicidaire ? Ces interrogations auxquelles nous n’aurons certainement pas de réponses, trottinent dans la tête des supporters de Dragons FC et les férus du football. Si l’ère Gbadamassi a été une réussite, pourquoi pas celle Mathurin de Chacus?
Un mauvais sort traîné à la FBF?
Pour ce qui concerne la gestion du football en général, le président de la FBF ne jouit pas véritablement de la fin de la crise qui a secoué l’instance faîtière du football national des années durant. Sa diplomatie est plus dirigée à l’externe qu’à l’interne. Il fallait imiter son prédécesseur. Pari gagné sans doute pour l’ambitieux président qui peut se réjouir de manger à la même table que Gianni Infantino de la FIFA ou un certain Patrice Motsepe de la CAF.
Si Mathurin de Chacus avait la possibilité de déplacer la FBF à la FIFA ou la CAF, il aurait pu réaliser cet exploit que certains pourront qualifier, à tort ou à raison, de forfaiture. Mais la différence avec l’ancien président Anjorin Moucharafou, c’est que ce dernier a réussi aussi bien la diplomatie externe qu’interne. Malgré toute la ruse du sulfureux et decrié Anjorin Moucharafou, le peu d’actes posés à l’interne plaide pour lui. Son audace dans certains dossiers et son entière disponibilité parlent encore plus. Autre Temps, autres mœurs diront certains.
Depuis bientôt trois ans que Mathurin De Chacus a pris les rênes de la FBF, rien n’a bougé. C’est la stagnation et le surplace. Tous les espoirs placés en lui se sont effondrés. Nous en avons pour preuve, le projet de réfection du Centre d’excellence de Missérété où règne un statu quo malgré la pause de la première pierre en présence de Gianni Infantino. Un véritable nid de reptiles qui perd son prestige de départ.
Une autre brèche dans la gangrène, il règne à la FBF, un manque d’initiatives de développement du sport roi. La gestion des ressources humaines laisse à désirer. Les vieux démons sont toujours présents. La maison football pue et a besoin de désinfectants. Mais le président Mathurin de Chacus peine à trouver la parade idoine pour remettre les choses en ordre. Une presque démission et le mythe de la personnalité sont institutionnalisés.
Des missions sans moyens, ce qui ouvre la voie au manque de résultats probants. Sous Mathurin De Chacus, les arbitres continuent de subir la loi de la violence de quelques supporters sur les stades non sécurisés. Ces hommes en noir comme on les appelle, continuent d’être envoyés en mission sans moyens. Sous son règne, la violation des textes est un très bon raccourci, la promotion de l’excellence, une rare denrée. Pas de formation digne du nom pour permettre aux entraîneurs de changer de grade. La dernière formation remontant en 2014 sous l’ancien président Augustin Ahouanvoébla.
Ceux qui sont allés se faire former à l’extérieur ont des difficultés à faire valoir leurs dossiers sur le continent pour défaut d’équivalence. La direction technique nationale est réduite à une seule personne dont l’impact sur le sport reste invisible. Adolphe Ogouyon dont le choix avait été sujet à polémique, est un ornement placé dans les locaux d’un centre d’excellence devenu un palais en ruine.
Le seul bilan dont se glorifie le président de la FBF est la qualification historique du Bénin pour les 1/4 de finale en Egypte lors de la dernière Coupe d’Afrique des Nations (CAN). Un exploit qu’on ne saurait mettre à l’actif d’une équipe dirigeante de la FBF visiblement démissionnaire. La conséquence directe de l’improvisation et l’amateurisme qui font leur grand retour, est l’élimination sur le fil du rasoir de l’équipe nationale de football pour la prochaine CAN au Cameroun lors de l’ultime journée face à la Sierra Leone. Ce qui devrait nécessiter une remise en cause. Mais hélas ! Mathurin De Chacus, l’éléphant annoncé est venu avec un pied cassé.