Djougou, de tout ce que les béninois voisins ou lointains en savent et racontent, est une bourgade extrême en religion, virulente en parole et violente dans l’action. Une caricature qui balaie tout d’une ville à mille potentialités jamais mises en valeur par les habitants et ressortissants, les dirigeants locaux encore moins les responsables étatiques. La cité est pourtant la 3ème béninoise, en démographie. Une des plus vieilles villes mais qui au fil de l’émancipation nationale s’est vue progressivement sous classée, négligée et même black-listée par les dirigeants qui vont se succéder à la tête du Danhomey, par la suite du Bénin. Ekétiinfo vous propose dans ce dossier de voir la ville dans un angle dépouillé de tous les stéréotypes. Pour une ville, en rappeler les nombreuses potentialités, la descente aux enfers tout le long de notre histoire politique contemporaine, l’occasion est belle à l’aune de cette extraordinaire ferveur de la désignation de Malick Gomina, le Directeur Général du Groupe de Presse Fraternité à la tête de son conseil communal.
Récit d’une relégation aux derniers plans
Wangara, du nom originel d’une ville bâtie sur les traces d’une étoile des grandeurs. Quand les empires maliens et ghanéens dominaient l’Afrique et qu’à l’Est l’influence arabo-musulman stimulait les pouvoirs hausa et peulh du nord Nigéria, Djougou jouait les jonctions. La ville est née en effet sur le carrefour des grandeurs de l’empire malien et de la florissante économie ghanéenne, le tout pour approvisionner la jouissive population haussa qui a sa jonction jusqu’aux royaumes du Fouta Djalon en or, orfèvres, colas etc. Le tracé de la route Savalou Djougou décidé par le colon, trouve là sa raison par ailleurs.
A l’époque, s’il faut citer Kandi parmi les zones influentes du grand Nord, il importe de rappeler que la ville de Natitingou n’existait quasiment pas selon plusieurs recoupements. Quant à Parakou, il donnait des signes d’une ville prometteuse mais d’elles toutes, Djougou avait l’avantage de la vieillesse, de la démographie mais hélas. L’indépendance et les luttes de positionnement interne vont bouleverser les donnes. D’abord le Président Maga va favoriser ses deux villes de naissance et d’adoption Natitingou et Parakou. Il contribue d’ailleurs à faire des deux, ce qu’elles sont aujourd’hui. Pendant ce temps, le fossé va se creuser entre Djougou et les dirigeants successifs. Quand la révolution Kérékou prend les destinés du pays, Djougou non seulement n’est pas dans ses priorités mais surtout manque un visage porte-étendard. Natitingou creuse l’écart, Parakou rompt la compétition. Nicéphore Soglo, Kérékou à nouveau, Boni Yayi et enfin Patrice Talon, la 3ème ville la plus peuplée du Bénin est restée l’ombre des ambitions de sa population. Personne de taille pour en prendre les destinées et en défendre les aspirations du peuple. Tout est à construire y compris de l’eau à rendre accessible.
Malick pour rendre Djougou fréquentable
2020, à l’issue des élections communales, Djougou n’est qu’un gros village distancé dans la course de développement par ses adversaires naturels et avec qui des villes comme Bassila ont même disputé le titre de chef-lieu de département de la Donga. Le comble de signe d’une descente à la relégation ultime.
Quand dans ces conditions Malick Gomina est annoncé pour diriger le conseil communal, beaucoup ont pris l’information comme relevant des manœuvres du Bloc Républicain, son parti, pour gagner les élections. La liesse à son installation et à sa désignation comme maire renseigne à suffisance. Cet homme, produit du monde des médias à la tête de la commune a, avant tout la mission de réécrire l’histoire et la perception de Djougou dans le subconscient et les esprits des béninois et de leurs dirigeants. Pour un homme de la communication politique, c’est une tasse facile à goulûment avaler. Du marché, l’urbanisation, les infrastructures au stade en passant par l’économie et l’agriculture locale, toute la vie communale a besoin d’un souffle qui s’appuie sur les reliques d’une ville aux belles promesses. Il faut des investissements massifs nationaux et étrangers. Pour un homme de réseau, Djougou peut espérer. Pour sa population, l’ultime bagarre diplomatique à engager pour surtout coller à l’histoire de la ville telle que nous l’avons résumé, il faut faire de cette commune une municipalité. Djougou doit être la 4ème commune à statut particulier du Bénin. C’est un vœu de la population qui se justifie d’ailleurs. Voir Malick Goimina accepter aussi siéger là-bas, très loin de son marigot est un signe. Signe des temps qui changent peu, mais pas seulement et sans nul doute la preuve avant l’heure du déclenchement prochain de grands travaux dont il a la promesse de la part d’un régime dont il est l’un des enfants chéris.