Quand certains serrent la ceinture et que d’autres se la sur-coulent douce, Joël Aïvo veut débattre avec Patrice Talon. Prétentieux tout de même…
C’est une adresse bizarre. Joël Aïvo dont la candidature n’a pas fini d’être déclarée veut débattre avec Patrice Talon. Un discours double, Joël le sait. Ses sorties, ses visites, ses escapades, ses tournées relayées pompeusement sur les réseaux sociaux font de lui un candidat potentiel. De cette étape à celle qui va le porter véritablement candidat, franchir la barrière des parrainages reste le casse-tête. Et pourtant le professeur agrégé ne semble pas vouloir s’embarrasser. Il attaque frontalement Patrice Talon. « Je veux débattre avec le chef de l’État », a-t-il lancé dans un message relayé par plusieurs médias en ligne ce mercredi 16 septembre 2020. Un débat dans les perspectives d’un second tour de la présidentielle à venir. Un culot ? Peut-être pas. Le candidat ou celui qui semble déjà penser au second tour croit avoir pour seul adversaire de taille, Patrice Talon. C’est donc lui qu’il veut aux joutes finales.
Stratégie communicationnelle ou stratégie politique, Frédéric Joël Aïvo en profite pour passer ses critiques. Il est rare, de nos jours, de voir le chef de l’État être critiqué. Dans un discours enveloppé par l’élégance d’un personnage politique du rang magistral, le constitutionnaliste interroge tout. Tous les acquis du bientôt quinquennat de la rupture. Le gouvernement dit avoir redressé le niveau social et la qualité de la vie. Aïvo oppose à cela « hôpitaux sans médecins », « CNHU sans équipements » « fonctionnaires humiliés dépouillés », « des entreprises traquées et fermées », « des hommes et femmes fuyant la vengeance et la justice », des « chômeurs sans perspectives ». Un tableau à revers dans un Bénin désormais à revenu intermédiaire.
Dans cette peinture écrite qu’a tissée le constitutionnaliste, il y a une loge pour les plus gâtés. Ce sont les collaborateurs du chef de l’État. A ce propos, Aïvo veut « parler avec le président de la République du salaire de ses ministres ». Il fait une pique claire sur un sujet où les dirigeants actuels sont plutôt réservés. Les salaires des ministres, hauts cadres et fonctionnaires ne sont connus que par ce que les rumeurs en disent. Les chiffres sont gardés secrets, laissant libre court aux imaginations. Mais, vu la persistance des rumeurs, certains Béninois croient que pendant qu’ils sont contraints à serrer la ceinture, les collaborateurs du président de la République sont payés à prix d’or. C’est la partie que prend Joël Aïvo qui évoque des « collaborateurs dont les salaires suscitent l’effarement et l’indignation».
Des Béninois à ceintures serrées et des Béninois sans ceintures, pour que Joël Aïvo puisse en parler avec Patrice Talon, il lui faut d’abord des parrainages et surtout passer l’étape du premier tour. Et ce sera pour le constitutionnaliste aux légendaires lunettes le premier face to face.