En initiant la réforme du système partisan, l’objectif à terme était de quitter les petits rassemblements identitaires pour ceux plus grands et idéologiques. Un résultat en demi-teinte. Regard sur ce qui pourrait être le plus gros échec des réformes sous la rupture.
C’est par la révision de la Charte des partis politiques et du Code électoral que la réforme du système partisan tant annoncée a commencé. Les remous au sein de la classe politique annonçaient déjà une suite orageuse. Les « fautes mineures » et celles considérées comme « majeures » par l’instance organisant les élections au Bénin (Céna) ont engendré de violentes manifestations sur toute l’étendue du territoire national. De ces manifestations, des morts ont été enregistrées, des blessés, et même des incarcérés ont vu leur vie basculer le temps de la réclamation d’une élection inclusive. Erreur de parcours, dira-t-on. Sauf que l’erreur est de n’avoir pas accepté faire des compromis pour permettre aux différents partis politiques de participer aux joutes électorales. Surtout que ces derniers ne cessaient de faire des va-et-vient afin de régulariser leur statut.
Malgré la réforme, les anciens démons peuvent ressurgir
En 2016, le nombre de partis politiques au Bénin approchait les 300 avec une cinquantaine de mouvements politiques divers. Si le Chef de l’État souhaitait voir naître en plus de ses « partis politiques (l’Union Progressiste et le Bloc Républicain) une troisième ou une quatrième force politique », au sein de l’opposition, ce souhait ne s’est pas réalisé malgré sa détermination. Entre la ténacité de certains chefs de partis de toujours peser dans le landerneau politique et la hargne de subsister de certains opposants, le compte n’y est pas pour le Chef de l’État. Des partis essayent de se frayer un chemin au cœur de la mouvance, d’avoir une place de choix. Si Moele-Bénin était un temps considéré comme la troisième voie qui pourrait promouvoir les jeunes, son absence aux joutes électorales fait douter de son avenir. Du côté de l’UDBN et du PRD, le défaut d’élus et leur ostracisation apparente au sein de la mouvance est frappante, obligés de jouer les seconds rôles. Ces trois partis qui se réclamant de la mouvance présidentielle se voient aujourd’hui susciter et soutenir la candidature de Patrice Talon à un second mandat. Alors qu’au-delà d’animer la vie politique d’un pays, le parti politique doit se battre pour la conquête du pouvoir.
Le nombre de partis se réclamant de l’opposition avoisine la dizaine. Dans cette atmosphère préélectorale, d’autres mouvements de jeunes voient encore le jour pour susciter et soutenir la candidature d’un tel. A cette allure, il est clair que la volonté de limiter le nombre de partis politiques au Bénin, va rester un vœu pieux. Dans les dix prochaines années, à ce rythme on pourrait retrouver la centaine de partis et mouvements politiques. Car, si au fond le discours politique des caciques n’a pas changé, leur attitude aura du mal à s’adapter à cette nouvelle mouture.
Un échec en appelle un autre
En n’arrivant pas à limiter les forces politiques comme il le souhaitait, le Chef de l’État a par ailleurs péché en prônant la réforme comme la panacée. Erreur ! Il nous a toujours été chanté, et cela est d’ailleurs vrai, qu’aucun politique n’a su se faire élire à la magistrature suprême. Et la réforme était aussi l’un des moyens pour susciter la candidature exclusive des politiques. Or, le Chef de l’État lui-même est aujourd’hui incapable de dire au peuple béninois son parti d’appartenance. En outre, en jouant sur les deux tableaux (UP et BR), il donne raison à ceux qui pensent que les deux partis sont siamois et n’ont de différences que leurs membres, leur ancrage politique, et ce afin de satisfaire les égos de ceux qui l’ont autrefois soutenu. Une méthode qui pourrait créer des conflits au sein des progressistes et des républicains après la gouvernance rupturienne. De ces deux partis, d’autres rassemblements politiques peuvent voir le jour. Ces créations de mouvements n’ont d’ailleurs jamais cessé malgré la réforme du système partisan.