Cinq mois après son déclenchement, la pandémie à coronavirus 2019 (COVID-19) continue de défier l’être humain et la science. Malgré le partage des informations médicales au niveau mondial, des questions concernant l’origine du virus; les mécanismes de transmission, la validité des tests de dépistage et l’efficacité des traitements en cours restent sans réponses scientifiques consensuelles. Dans ce contexte incertain serti d’intérêts géopolitique et financier, stimuler la réponse immunitaire contre ce féroce virus par les moyens simples comme la pratique des activités physiques, est à coup sûr une option gagnante. Et cet article révèle les bénéfices d’activités physiques sur le système immunitaire, la santé physique et mentale en général.
Pour limiter la propagation vertigineuse du coronavirus, les pays ont adopté les mesures de riposte et de précaution telles que la fermeture de frontières et lieux publics, le couvre-feu, la limite du trafic aérien, le télétravail, le confinement et gestes barrières. Le respect desdites mesures impérieuses engendre la restriction des déplacements, la perte d’emploi, l’isolement et le stress chez de nombreuses personnes. Au demeurant, leur santé et leur bien-être mental peuvent être menacés, surtout si elles ne pratiquent aucune forme d’activité physique à domicile. Et c’est fort de ce constat que nous avons recommandé aux citoyens, dans un article intitulé « Comment booster votre système immunitaire pour lutter contre le coronavirus? » (La Nation, numéro7469 en date du 20 avril 2020), de s’adonner aux activités physiques durant cette pandémie.
Il importe de comprendre que le système immunitaire (expliqué dans l’article susmentionné) est au cœur des mécanismes d’action de vaccins et traitements antiviraux. En attendant la mise au point de remèdes prouvés contre ce scabreux coronavirus, aussi bien en Afrique qu’ailleurs, stimuler le système immunitaire par les moyens pratiques et sûrs est une option gagnante. Dans les sections suivantes, nous traitons des bienfaits de l’activité physique sur le système immunitaire durant cette crise sanitaire ; nous suggérons enfin quelques exercices adaptées au contexte.
Généralités sur l’activité physique
L’activité physique (AP) est définie comme tout mouvement corporel produit par les muscles squelettiques entraînant une dépense énergétique.
Il y a, brièvement, trois types d’AP: l’endurance aérobie ou cardiorespiratoire pour faire travailler le cœur et les poumons ; l’entraînement musculaire en résistance pour renforcer les muscles et les os et la flexibilité pour détendre les muscles et demeurer souple. Les bénéfices d’un type sur la santé sont tributaires de la fréquence, la durée et l’intensité de l’activité. La notion d’intensité revoie à l’énergie dépensée au cours de l’effort. Pour une même durée, la dépense énergétique est d’autant plus élevée que l’activité ou l’exercice est intense. Voici quelques exemples proposés par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) :
– Activité physique modérée (elle demande un effort moyen et accélère sensiblement la fréquence cardiaque) : marcher d’un pas vif ; danser ; s’acquitter de travaux ménagers et domestiques ; soulever/déplacer de lourdes charges ; faire du bricolage (par ex. réparations de toitures, peinture), etc.
– Activité physique d’intensité élevée (elle demande un effort important ; le souffle se raccourcit et la fréquence cardiaque s’accélère considérablement.) : courir ; faire du vélo à vive allure ; nager à vive allure ; faire des sports et jeux de compétition, etc.
Durant cette pandémie, l’OMS recommande aux adultes, 150 minutes d’activité physique d’intensité modérée ou 75 minutes d’activité physique d’intensité élevée par semaine ou une combinaison des deux (1).
Impact de l’activité physique sur la fonction immunitaire
Les études ont globalement montré que l’activité physique (surtout modérée) améliore la fonction immunitaire en ce sens qu’elle favorise la production et la mobilisation des lymphocytes capables de reconnaître et de détruire les cellules infectées par un virus. A titre d’exemple, une étude conduite au Danemark a montré que l’interleukine-15 (ou cytokine L-15, une protéine d’origine musculaire), cruciale pour l’activation et la prolifération des lymphocytes T, était libérée après un exercice en résistance chez les hommes Danois âgés de 25 ans ; ce qui avait entrainé par la suite une mobilisation efficace des cellules T (2).
Une AP régulière peut également avoir un effet positif sur le système immunitaire via d’autres mécanismes tels que la prévention d’une inflammation chronique dite de bas grade. Pour rappel, l’inflammation provoquée par notre système immunitaire est un phénomène essentiel qui permet à certains globules blancs (les macrophages) d’éliminer d’éventuels agents pathogènes qui tenteraient d’envahir notre corps. Par contre, lorsqu’elle se produit sur une longue période ou de façon intense, elle devient chronique et nuit au système immunitaire. L’inflammation chronique peut provoquer le développement de plusieurs pathologies.
Les comportements sédentaires (s’asseoir à ne rien faire, conduire une voiture, regarder la télévision, s’adonner au jeu vidéo, etc.), doublés de l’excès de lipides ou matières grasses dans notre alimentation, sont responsables de la prévalence accrue de l’obésité caractérisée par un excès de graisse corporelle abdominale. Cette adiposité abdominale, à son tour, engendre une inflammation chronique dont les conséquences sont une hausse significative de l’incidence de maladies chroniques (diabète de type 2, maladies cardiovasculaires, certains cancers). C’est dire que l’exercice physique peut réduire l’inflammation chronique par son impact positif sur la prévention ou le traitement de l’obésité. Autre possibilité rapportée dans la littérature, l’exercice pourrait prévenir l’inflammation chronique indépendamment du statut pondéral. Cependant, les mécanismes sous-jacents responsables de cet effet anti-inflammatoire directe ne sont pas entièrement élucidés (3, 4 et 7).
Impact de l’activité physique sur la sénescence des tissus immunitaires
Le système immunitaire vieilli avec l’âge ; ce qui génère davantage, entre autres, une sensibilité aux infections notamment respiratoires et une réactivation fréquente des virus latents. On remarque d’ailleurs que les personnes de troisième âge sont particulièrement plus vulnérables aux symptômes sévères du COVID 19.
Il a été démontré que l’augmentation du niveau d’activité physique de sujets âgés prévient le déclin des fonctions immunitaires. De plus, on rapporte dans les études que les sujets âgés qui ont pratiqué une activité physique sur une base régulière avaient de meilleures performances cognitives puis présentaient une perte de tissu cérébral moindre que leurs homologues sédentaires (5 et 6)
Bienfaits psychologiques de l’activité physique
L’exercice a des effets positifs dans la prévention et le soulagement des symptômes dépressifs. On rapporte que la pratique d’un exercice de plus de 45 minutes provoquait la sécrétion d’endorphines, un antidépresseur naturel qui favorisait la détente et la bonne humeur (8).
L’activité physique aide à équilibrer les niveaux de cortisol ; ce qui est bénéfique pour le contrôle du stress. En effet, la crise sanitaire actuelle est fortement source de stress et de détresse à bien des égards. Elle peut donc créer un déséquilibre des niveaux de cortisol chez les citoyens, ce qui va impacter négativement la fonction immunitaire (9).
La littérature scientifique a examiné le lien entre l’activité physique et la stimulation de la réponse immunitaire contre les infections virales. Les activités comme la marche rapide sur une base régulière activent les cellules du système immunitaire puis contribuent à la gestion du stress. Vous n’avez donc pas besoin d’entreprendre un programme d’entraînement olympique pour profiter pleinement des bienfaits de l’exercice par ce temps de pandémie. En plus de respecter les gestes barrières, nous vous suggérons de :
- Marcher d’un bon pas, 30 minutes au moins par jour.
- Vous lever de votre siège après 1 heure de travail ; faire des exercices d’étirements ; les exemples de mouvements sont montrés dans le document de l’OMS (http://www.euro.who.int/en/health-topics/health-emergencies/coronavirus-covid-19/technical-guidance/stay-physically-active-during-self-quarantine).
- Jouer activement avec les enfants.
- Danser chez vous : la salsa, les danses traditionnelles béninoises sont convenables.
-Avant de vous coucher, effectuer les exercices de respiration pour vous relaxer.
Références bibliographiques
1- OMS. Stay Physically Active During Self-Quarantine. 2020. Disponible sur : http://www.euro.who.int/en/health-topics/healthemergencies/
coronavirus-covid-19/novel-coronavirus-2019-ncov-technicalguidance/
stay-physically-active-during-self-quarantine (consulté le 29 mai 2020).
2- Nielsen AR, Mounier R, Plomgaard P et al. Expression of interleukin-15 in human skeletal muscle effect of exercise and muscle fibre type composition. J. Physiol.2007; 584(P1):305–312.
3- Dorneles GP, Dos Passos AAZ, Romao, PRT et al. New insights about regulatory T cells distribution and function with exercise: the role of immunometabolism.
Curr Pharm Des. 2020; 26:979–990.
4- Jakobsson J, Malm C, Furberg M et al. Physical Activity During the Coronavirus (COVID-19) Pandemic: Prevention of a Decline in Metabolic and Immunological Functions. Frontiers in Sports and Active Living. 2020; 2(57):1–4.
5- Weyh C, Kruger K, Strasser, B. Physical activity and diet shape the immune system during aging. Nutrients. 2020; 12:622.
6-Bangsbo J, Blackwell J, Boraxbekk CJ et al. Copenhagen consensus statement 2019: physical activity and ageing. Br.J. Sports Med. 2019; 53:856.
7- Campbell P, Turner JE. Debunking the myth of exercise induced immune suppression: redefining the impact of exercise on immunological health across the lifespan. Front. Immunol. 2018; 9:648.
8- Dunn AL, Trivedi MH, Kampert JB et al. Exercise treatment for depression: Efficacy and dose response. Am. J. Prev. Med. 2005; 28(1):1-8.
9- Stubbs B, Vancampfort D, Rosenbaum S et al. An examination of the anxiolytic effects of exercise for people with anxiety and stress-related disorders: a meta-analysis. Psychiatry Res. 2017; 249,102–108.
Par Abdel Karimou MOROU, PhD