Patrice Talon au pouvoir aurait pu s’appeler « Guillaume la reforme ». En 5 ans, il a reformé. Jusqu’à l’ordre des couleurs nationales. Dans moult secteurs, la mayonnaise a semblé donner goût, excepté l’éducation.
Depuis 2016, le secteur a été constamment au devant de la scène. De la maternelle au supérieur, Patrice Talon a repris la main. Au moyen des décrets et lois, le secteur résonne désormais Talon. La démocratie électorale universitaire s’est ainsi éclipsée au profit d’une régence gouvernementale directe. Toujours au supérieur, le sort des enseignants candidats aux grades du CAMES n’a plus rien en commun à celui des chercheurs d’antan. La carte universitaire ramenée aux dimensions rêvées par le chef de l’État se conjugue désormais avec un déploiement des enseignants chercheurs sur tout le territoire où besoin sera. Leurs vacations et interventions en dehors de leurs prérogatives et devoirs envers l’État sont régentés, réglementés.
Les universités privées auront aussi eu pour le compte avec, à la clé, un examen national. En somme, le supérieur sent du Talon et les acteurs ont tout lâché de gré ou de force, les parents aussi.
Le secondaire n’a pas été du reste. Entre enseignants grévistes qui perdaient ce privilège devenu indécent et des investissements annoncés, il s’est glissé l’enfer des vacataires qui sont devenus aspirants. Un changement de nom pour rendre complète la reforme arrosée de contrôles intempestifs du niveau des enseignants.
Dans les maternel et primaire, la reforme a pour nom : cantines scolaires, pour plus de repas chauds. Une réforme réchauffée, merveilleuse qui aurait attiré plus d’écoliers que le pays n’en attendait. Là encore, quand par la force de la loi, la grève a été boutée dehors, on s’attendait que le chef de l’État se frotte la main en fin de mandat pour un bilan qui ferait pâlir l’opposition voire les pays voisins. Pourtant le Bénin est loin du compte.
Les réformes du secteur éducation résonnent cafouillages. L’enseignement secondaire est le symbole de l’échec de la rupture dans l’enseignement. Défaut de déploiement. Défaut de paiement. Défaut de matériel. Une couverture approximative du pays en ressources humaines. Une désorganisation du système dit de vacation. Les problèmes sont nombreux et les responsables des collèges se démerdent comme ils peuvent.
Le tableau n’est pas digne du « Agbonon » pour un pays qu’il révèle tel qu’il le martèle. Et pour détourner les regards et attentions, la fenêtre trouvée par Patrice Talon depuis le début de sa tournée : « L’école forme au chômage ». Le président de la République le dit et le répète. Patrice Talon le martèle avec tellement de conviction que l’on est tenté de croire qu’il a une petite ambition de convaincre les Béninois à le croire.
Pourtant, dire que l’école béninoise forme au chômage, c’est finir par inquiéter les paysans. Eux qui le savaient déjà avant la chute de la révolution. Eux qui l’ont su davantage avec l’ancien président Nicéphore Soglo, quand de force, leurs cousins furent poussés aux départs volontaires. Ces paysans qui le savent parce qu’ils ont vu Yayi trimer par monts et vallées sans jamais réussir à redresser la pente de l’emploi. Que Patrice Talon réforme l’école en 5 ans et finir par ne dire qu’elle forme au chômage, c’est tout simplement inquiétant, au mieux une pure et simple diversion.
Le gouvernement de Patrice Talon trouve ainsi faux-fuyant pour cacher son incapacité après tant de réformes. Certes, il est de notoriété publique – cela ne date pas du régime Talon – qu’il y a une inadéquation entre le marché de l’emploi et la formation. C’est ce discours que Patrice Talon devrait plutôt tenir. Le gouvernement promet de mieux mettre l’accent sur la formation technique. De quoi peut-être mettre fin à la grande pagaille dans le secteur de l’éducation et mettre fin à la diversion de la rupture avant ou probablement après avril 2021.