Brouilles, critiques, échanges d’invectives via médias et réseaux sociaux interposés, points de vue opposés sur tel ou tel autre match, parfois même des agressions physiques. La relation journalistes sportifs et athlètes n’a jamais été un long fleuve tranquille. Ambiance bonne un jour, délétère le jour d’après.
Un rapport très versatile. Pourtant, les personnes appartenant à ces deux corps de métiers sont obligées de collaborer. Mais qu’à cela ne tienne ! Puisque ces rapports conflictuels qu’entretiennent journalistes sportifs et athlètes ont refait surface dans le monde sportif béninois le 5 novembre dernier. À cette date, la liste des 24 écureuils sélectionnés pour la double confrontation du Bénin face au Lesotho dans le cadre des 3è et 4è journées des éliminatoires de la CAN de football Cameroun 2022 a été publiée. Moïse Adilehou, le défenseur béninois buteur contre le Maroc en huitième de finale de la CAN 2019 n’y figurait pas. Beaucoup de médias en ont fait cas, le site d’information sportive Bénin Football aussi.
L’article de cette plateforme d’informations sur l’absence du défenseur du NAC Breda en première division hollandaise a révélé ou ramené dans l’actualité le rapport conflictuel que peuvent entretenir un journaliste sportif et un athlète. Au lieu de demander un droit de réponse, comme les textes lui en donnent le droit, Moïse Adilehou s’est saisi du réseau social Facebook pour contre-attaquer le site Bénin Football sur les analyses faites par le confrère sur sa carrière et surtout sur son absence en sélection. Le natif de Colombes en France s’est fendu d’un message dans l’une de ses réponses. Morceau choisi : « J’ai juste dit que votre article était faux et que celui qui l’a partagé me réclame de l’argent et j’ai refusé. Mais je lui ai passé mon maillot tout de même. » Une affaire d’argent donc. Un article à charge, diront un journaliste béninois et un confrère de la sous-région après lecture et qui ont préféré garder l’anonymat. Quelques semaines après, ces faits ont inspiré un sujet auprès de la rédaction sportive de votre site d’information. Quelle doit être la relation journaliste sportif – athlète ? Avis de quelques avertis du sport.
Un professionnel, c’est quelqu’un qui a fait d’une activité son métier donc une profession contrairement à l’amateur. Et cela respecte des règles établies par la profession. Comme on l’enseigne dans les écoles de journalisme, le journaliste, c’est d’abord le contact et la distance. Pour Billy Houto analyste sportif camerounais, la notion contact – distance : c’est « aller vers la source pour recueillir l’information (contact) » et la distance, c’est que « le journaliste ne doit pas forcément s’attendre à un avantage, un retour financier ou quoi que ce soit après être entré en contact avec sa source (le sportif) ». Plus loin, ce n’est pas parce que le journaliste fait des reportages, écrit des articles sur tel sportif, que le jour où il aura l’occasion de le rencontrer, doit exiger de lui des avantages. Cette compréhension des choses n’est toujours pas la réalité sous nos tropiques. La faute au manque d’indépendance des médias, le peu d’importance accordée aux médias et journalistes sportifs sans oublier un salaire dérisoire. Ce qui donne lieu à cette mendicité journalistique, déplorent des observateurs. Et le phénomène ne concerne pas que les journalistes sportifs. Les autres journalistes ne sont pas épargnés.
Journaliste sportif ou chargé de communication de l’athlète ?
Si les rapports deviennent tendus entre journaliste sportif et athlète, celui-ci aussi a sa part de responsabilité. Son professionnalisme peut, de temps à autre, laisser à désirer.
Quand un journaliste sportif, comme tout autre journaliste, s’en tient aux faits pour relayer une information comme on le lui a enseigné, sur un joueur qui est dans une période compliquée, la pilule est difficile à avaler. « Les athlètes ont parfois des problèmes avec la vérité surtout quand ils sont dans une mauvaise passe. Et le pire, c’est leur famille qui s’en mêle » fait observer Billy Houto. Un confrère qui requiert l’anonymat, dira pour sa part que les athlètes africains surtout ceux béninois « sont dans un refus permanent quand tu vas vers eux pour avoir des informations, pour leur poser des questions. » Or, quand tu fais ton papier à base d’informations glanées ici et là, « ils estiment que tu n’as pas la bonne information. Pourtant, le journaliste est allé à la source mais n’a pas pu avoir la bonne information. Je ne peux pas voir du noir et dire que c’est du blanc. Soit tu décides que je sois ton communicateur, et là je change de casquette afin de polir ton image », ajoute-t-il. Et comme pour confirmer les choses, dans le cadre de ce sujet, nombreux sont ces athlètes et coachs qui ont refusé de nous accorder des interviews.
Le rapport journaliste sportif – athlète peut aller au-delà du professionnel. Et les exemples sont légion. Quand le regretté Pape Diouf dans son métier de journaliste n’écrit plus sur l’Olympique de Marseille et particulièrement sur un mauvais match de Joseph Antoine Bel, il propose qu’un collègue le fasse. C’est la preuve que Pape Diouf voulait rester professionnel, vu les relations qui le lient à l’ancien gardien. S’entêter à le faire, l’obligerait à faire preuve de professionnalisme, d’impartialité. Ce qui peut enrhumer leur relation. À moins que l’athlète décide de faire du journaliste son communicateur et que celui-ci revoit donc sa posture. Il devra ensuite se conformer à sa nouvelle exigence et s’attendre, tout logiquement, dans le cas d’espèce, à des rémunérations.
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