Dans quelques mois, les Béninois vont élire leur président de la République. Si tout indique une réélection du chef de l’Etat Patrice Talon, des organisations de la société civile font savoir que le compétiteur né gagnerait à remporter la bataille à la régulière.
Ils sont 10 structures, organes, organisations et associations qui ont décidé de faire savoir au compétiteur né, le numéro 10 béninois, qu’il est important que le peuple ait une liberté dans son choix en 2021. Dans un document d’une dizaine de pages, ces acteurs de la société civile insistent sur l’ « urgence d’une relecture consensuelle du cadre légal électoral en vue de l’élection présidentielle de 2021 ». Cette relecture, écrivent ces acteurs, vise « la paix et le renforcement de la démocratie » au Bénin. Pour ces OSC, l’un des moyens actuels pour la consolidation de la paix au Bénin passe par la suppression du parrainage. Sur les 160 parrains, 154 sont des soutiens du régime actuel.
Un cadeau pour la démocratie
Si ces acteurs de la société civile reconnaissent que le parrainage existe dans d’autres pays, ils ajoutent que celui mentionné dans le code électoral est « essentiellement crisogène ». Ils ajoutent que cette disposition de désignation de candidats au scrutin présidentiel est « substantiellement injuste, inégalitaire et potentiellement déclencheur de violences lors de la présidentielle de 2021 ». Si les lois électorales ne sont pas modifiées, Patrice Talon pourra se faire réélire sans aucune compétition, telle que prévoit la démocratie. Les dernières législatives de 2019 ont conduit à des violences. Au Bénin, outre les législatives, la présidentielle est un scrutin majeur. Le régime de la rupture doit faire en sorte de ne pas en priver les voix dissonantes.
Il est important que le pouvoir se rende compte qu’en permettant une élection plurielle, ce n’est pas un cadeau qui est fait à l’opposition. Depuis les dernières législatives de 2019, la classe politique, dans son entièreté, a été incapable de faire grandir la démocratie béninoise. Conséquence, si l’opposition ne va pas à ce scrutin présidentiel, c’est la démocratie béninoise, pour ce qui en reste, qui va encore prendre un coup. Lorsqu’un peuple ne se reconnaît pas en un président, il sent ses intérêts pas pris en compte. Une partie du peuple qui n’est pas d’accord avec la gestion d’un pouvoir a le droit de faire passer son message à travers des élus dans les conseils communaux et au parlement. Lui retirer ce droit, c’est ne pas vouloir écouter ses doléances.
Evaluer la rupture
Patrice Talon sait qu’il a un boulevard tout ouvert devant lui pour se faire réélire dans l’état actuel des textes. Ses partisans, députés, maires, pensent peut-être à 2026, sachant qu’il a déjà remporté la bataille de 2021. Le chef de l’Etat, qui aime les défis, doit pourtant se demander s’il pouvait remporter la compétition à la régulière. Patrice Talon, le compétiteur né, le sait : il en sortira politiquement renforcé s’il bat ses adversaires. De plus s’il perdait le scrutin, il aura laissé des empreintes à la postérité. Si son successeur en venait à détricoter toutes ses réformes, Patrice Talon pourra compter sur le peuple. « Du temps de Patrice Talon, c’était mieux ! », entendra-t-on dire.
Alors que des pays comme la Guinée et la Côte d’Ivoire sont dans une crise préélectorale, le Bénin ne peut et ne doit pas plonger, de nouveau, dans une crise politique. Au Mali, les résultats contestés des dernières élections législatives ont été l’élément déclencheur de la crise qui couvait dans le pays. Les pays voisins du Bénin, le Niger, le Burkina Faso organisent une élection présidentielle avant la fin de cette année. La situation est loin d’être apaisée dans ces deux pays. Si les Béninois aspirent à voir leur pays développé, ils tiennent aussi à la stabilité politique du Bénin. La rupture peut encore leur démontrer qu’ils ont bien raison.