Après les dernières décisions de la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples visant le Bénin et la Côte d’Ivoire, le président de la CADHP pointe du doigt la crédibilité de l’Union africaine.
La CADHP a demandé récemment au gouvernement du Bénin d’annuler l’abrogation de la révision de la Constitution intervenue entre le 31 octobre et le 1er novembre 2019. La Cour a également enjoint à Porto-Novo de rétablir le droit de grève. Réponse défavorable du Bénin. Il n’est pas sûr par exemple que le scrutin présidentiel du 11 avril induit par la révision de la Constitution ne se tienne pas à cette date.
Respecter la loi
Sur la radio internationale allemande, la Deutsche Welle, mercredi (16.12), le président de la CADHP, Sylvain Oré, a constaté que « les Etats n’aiment pas perdre ». Ce juge ivoirien ajoute cependant que « l’état de droit a un coût : c’est le respect de la loi quoiqu’il en coûte». Le président de la CADHP insiste sur les décisions de la Cour rendues sur des questions qui concernent le Bénin et la Côte d’Ivoire que la juridiction basée à Arusha en Tanzanie a dit le droit en toute indépendance.
La CADHP a été beaucoup critiquée en Côte d’Ivoire mais aussi au Bénin. « Il serait dangereux de croire que ces critiques ou ces observations, ces commentaires à l’égard de la Cour puissent entamer son indépendance, non il n’en est pas question », réplique Sylvain Oré, le président de la CADHP.
La Cour avait aussi rendu une décision dans une affaire qui était pendante devant la Cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA). Ce qui a déplu au gouvernement. « Les égarements de la Cour africaine sont devenus source d’une véritable insécurité juridique et judiciaire », avait dit le ministre de la Justice, Sévérin Quenum. Le gouvernement a alors décidé de retirer aux citoyens et aux ONG la possibilité de saisir directement la Cour.
Droits de l’Homme violés
Interrogé, le président de la CADHP répond que la Cour n’a pas « empiété sur les compétences de la CCJA ». « Lorsque nous sommes saisis, c’est parce que les requérants qui nous saisissent font part de certaines allégations de violations des droits de l’Homme qui sont contenus dans les instruments qui ont été ratifiés par les Etats défendeurs », ajoute Sylvain Oré.
Le président de la CADHP observe que la juridiction africaine est un bébé « incompris ». Il n’exclut pas de mieux la faire comprendre. Comme le Bénin, la Côte d’Ivoire et d’autres pays, même la Tanzanie où siège la Cour, ont retiré à leurs citoyens et ONG le droit de saisir la CADHP. Le président de la CADHP reconnaît que c’est un coup porté à la Cour. Il ajoute cependant que « si la cour subit un coup les Etats, d’ailleurs l’Union africaine dans son ensemble, subissent aussi un coup ». Il évoque « un coup à la crédibilité de l’engagement des Etats et de l’union aux principes de l’état de droit, de la démocratie et de la bonne gouvernance ».
La CADHP a été créée par les Etats africains pour protéger les droits de l’Homme et des peuples, les libertés et les devoirs sur le continent. C’est en 1998 que la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de l’ancienne Organisation de l’Unité Africaine (OUA), actuelle Union Africaine (UA) a adopté, à Ouagadougou au Burkina Faso, le Protocole à la Charte africaine portant création de la CADHP. Ce Protocole est entré en vigueur le 25 janvier 2004.