Les lignes de nos bibliothèques s’enrichissent d’une nouvelle œuvre littéraire et pas des moindres. « Bris de silence », cet ouvrage voulu et rendu possible par la journaliste écrivaine, spécialiste des questions de santé, Angela Kpeidja, est désormais disponible. Ce recueil de témoignages des violences sexuelles subies par l’auteure, notamment à l’Université d’Abomey-Calavi (UAC) et à l’Office de radiodiffusion et télévision du Bénin (ORTB), a été officiellement lancé, ce 20 août à Cotonou.
Dans cet ouvrage, Angela Kpeidja a relaté sa vie en 250 pages, une vie perturbée par des « prédateurs sexuels », mais une vie qui tient debout, et qui est aujourd’hui, au service d’un combat, la libéralisation de la parole de la femme victime d’agression sexuelle ou morale. Car le silence est de loin, le carburant du phénomène du harcèlement sexuel et moral dans les milieux professionnels et universitaires. « À y voir de près, le terreau de cette violence et discrimination reste le silence, un silence qui tue, qui nous arrache toute volonté de nous battre », souligne l’auteure.
L’ouvrage fait le témoignage des violences sexuelles essuyées par l’auteure, notamment dans son milieu professionnel, l’Office de Radiodiffusion et Télévision du Bénin (ORTB). Angela Kpeidja sans langue de bois a décrit des spectacles « indécents » auxquels se sont livrés, soit un collègue ou soit un patron, pour obtenir d’elle, un plaisir sexuel. Ils n’ont épargné aucun abri, bureau, studio du journal télévisé ou encore voiture ; ils n’ont pas de pudeur à laisser tomber leur pantalon et exhiber leur « zizi ».
Angela Kpeidja reste marquée par ces actes, qui sapent le moral de la femme et qui contribuent à son déséquilibre et par ricochet, à celui de la société. Si elle s’est lancée dans cette lutte de libéralisation de la parole chez la femme victime de violence sexuelle, c’est surtout grâce à ses soutiens. « Je dois avouer, que rien n’aurait été possible sans vous, dans chacun de vos gestes, dans chacun de vos messages, et même dans vos sourires les plus subtils et discrets, j’ai puisé la force de me relever ». Pour l’auteure, c’est l’heure du changement, changement de comportement et changement de regard sur la condition féminine au Bénin. À travers sa plume, elle veut contribuer à l’ouverture des « portes de l’espoir » aux victimes de violences de tous genres.
Angela Kpeidja a ouvert une brèche dont l’ensemble de la société en l’occurrence les femmes devraient profiter pour se libérer, dénoncer afin de faciliter le combat. Il faut donc une synergie d’actions soutient la marraine de la cérémonie. « Les luttes individuelles ont plus d’impact quand elles deviennent collectives », a fait savoir Eveline Diatta-Accrombessi. Pour y arriver, la mobilisation des acteurs de la société civile, pour un accompagnement des victimes est indéniable. De même, un cadre législatif strict et dissuasif, pour les auteurs du harcèlement doit être mis en place. La ministre des Affaires sociales et de la microfinance promet d’ailleurs un durcissement du cadre législatif y relatif au Bénin. Véronique Tognifodé a mis l’accent, cependant sur l’importance de la dénonciation dans le processus de répression du phénomène. La ministre qui veille sur les filles et les femmes encourage l’audace de l’auteure, un modèle pour les jeunes filles selon elle.
Angela Kpeidja, nouvelle figure de la lutte contre le harcèlement sexuel
Depuis sa sortie fracassante, le 1er mai 2020, pour dénoncer les violences qu’elle subissait sur son lieu de travail, Angela Kpeidja fait office de nouvelle figure de la lutte contre le phénomène du harcèlement sexuel au Bénin. À la suite de cette sortie, qui a fait beaucoup de bruit dans le pays et au-delà, le sujet a percé les murs du palais de la Marina. Le chef de l’État la recevra, avec la promesse d’accompagner la lutte. Angela Kpeidja sent ensuite le besoin de mettre sur pied une ONG « N’aie pas peur », pour mieux poser les bases d’une lutte contre le phénomène, mais être aussi aux côtés des filles et des femmes. Dans la foulée, un directeur de société à la « libido débordante » a été condamné en juillet dernier, à 15 millions FCFA, pour harcèlement sexuel. Des sanctions, qui devraient se multiplier grâce à la volonté commune des acteurs de la société pour endiguer le mal. Et « Bris de silence » devrait être dans toutes les maisons.