Les Centrafricains sont appelés aux urnes dimanche prochain pour élire leur président et renouveler leur parlement. Mais ce pays en pleine instabilité depuis 2013 n’est pas encore au bout de ses peines.
Plusieurs régions de la Centrafrique sont en proie à de nouvelles violences menées par des groupes armés. Ces mouvements insurrectionnels qui partagent les mêmes revendications que la coalition de l’opposition, menacent de marcher sur Bangui la capitale si les élections ne sont pas reportées.
Pourtant, ce pays d’Afrique centrale déchiré par la guerre depuis 2013 affichait une volonté de vouloir tourner cette sombre page de son histoire. C’est du moins l’appréciation faite tôt par des observateurs après le retour au pays des anciens présidents François Bozizé et Michel Djotodia. Mais cette lueur d’espoir semble faire long feu. La candidature de François Bozizé pour la présidentielle est invalidée pour des crimes supposés. Il finira par accepter la décision de la Cour constitutionnelle plusieurs jours plus tard. L’ancien président décide de soutenir la candidature d’un candidat en lice pour la présidentielle, l’ancien Premier ministre Anicet Georges Doléguélé. Sans aucun lien réel avec l’invalidation de la candidature de François Bozizé, des groupes de miliciens opérant dans le pays fusionnent le 17 décembre 2020 et donnent naissance à une entité dénommée « Coalition des Patriotes pour le Changement (CPC) ». La tension se ravive alors dans certaines provinces. Les groupes armés ont pris possession mardi (22.12) de la ville de Bambari, à plus de 300 kilomètres de la capitale Bangui. Depuis vendredi (18.12), ces groupes armés occupent des villes importantes pour le ravitaillement de la capitale centrafricaine.
Bozizé pointé du doigt
Malgré l’invalidation de sa candidature, François Bozizé reste l’homme le plus redoutable aux yeux de la mouvance présidentielle. Le pouvoir de Bangui l’accuse d’ailleurs de préparer un coup de force, ce que dément le parti de l’ancien président. Habitué des coups d’État dans le pays, François Bozizé est vu comme l’instigateur de la recrudescence des violences perpétrées par des miliciens. François Bozizé est très proche des leaders des groupes armés. Depuis son exil, l’homme était déjà accusé de soutenir les mouvements insurrectionnels en 2013 et 2014 pour déstabiliser la Centrafrique. Chassé du pouvoir en 2013 par la Séléka, Bozizé garde toujours une côte de popularité considérable selon des observateurs. Ses ambitions présidentielles sont loin d’être à leur apogée.
La politique de l’actuel président centrafricain, Faustin-Archange Touadéra, n’est pas du goût des mouvements armés. Dans la déclaration qui a sanctionné leur fusion, les groupes armés s’attaquent directement à la politique étrangère du chef de l’État centrafricain qu’ils sont « Désireux d’inscrire la République de la Centrafrique sous la double option d’une diplomatie ouverte à tous les pays amis et à une coopération gagnant-gagnant d’une part ; d’une large intégration économique en Afrique centrale d’autre part ». Ce désir, bien que théorique, désavoue clairement la diplomatie du président Touadéra qui s’éloigne de la France au profit de la Russie.
La Centrafrique à deux doigts d’un nouveau chaos
Bangui connaît depuis des années des conflits internes incessants. Les tentatives d’un possible dialogue entre acteurs ont été soldées par des échecs. La fertilité du sous-sol centrafricain cristallise l’attention des puissances étrangères. Le pays est pourtant classé parmi les plus pauvres du monde.
Les élections du 27 décembre 2020 pourraient remuer le couteau dans une plaie encore béante. Une crise préélectorale s’est déjà installée. Les groupes armés ont déjà fait montre de leur capacité de nuisance dans le pays. Le chaos paraît inévitable si les deux parties ne sont pas prêtes à faire des concessions. Comme les partenaires internationaux de la Centrafrique, le président sortant Faustin-Archange Touadéra souhaite aller aux élections. La contestation sera systématique et le chaos va de nouveau s’installer. On n’est pas loin d’une crise postélectorale.