Après sa prise de service suite à son congé maladie, le maire de Cotonou doit faire face à la réalité de la gestion de la ville-département.
Bohicon n’est pas Cotonou ! Si Luc Atrokpo ne le savait pas, il doit s’en être certainement rendu compte ces dernières heures. Dans la même journée du mercredi 28 octobre, il sort deux arrêtés. L’un pour interdire « jusqu’à nouvel ordre » « tout rassemblement et toutes manifestations publiques à caractère festif, revendicatif et politique » à Cotonou. Dans l’autre arrêté, le maire de la municipalité de Cotonou se dédie, tourne casaque. « Est levée à titre exceptionnel […] la mesure d’interdiction provisoire de tout rassemblement et de toutes manifestations publiques sur toute l’étendue du territoire de la Commune de Cotonou », indique le texte signé Luc Sètondji Atrokpo.
Pour un maire qui, cinq mois après les communales, entre véritablement dans ses habits de chef de l’exécutif municipal, ça fait un peu désordre. Officiellement, on ignore les vraies raisons de ce revirement. Pas facile, on l’imagine, pour le maire d’en donner publiquement les explications. La lettre du préfet intérimaire du Littoral est-elle pour quelque chose ? Difficile de le dire. Pour autant, cette lettre du préfet Jean-Claude Codjia adressée à l’initiateur d’une marche semble indiquer qu’une marche aura lieu. Cette lettre est signée le 28 octobre, le même jour que les deux arrêtés du maire de Cotonou. La collaboration entre le maire de Cotonou et le préfet, tumultueuse entre Léhady Soglo et Modeste Toboula, a encore du mal à prendre entre Wologuèdè et Ganhi.
Cotonou, ville chaude
Luc Atrokpo ne devrait pas avoir de mal dans sa collaboration. Le préfet et lui sont acquis à la cause du pouvoir en place. Ceci devrait lui faciliter la tâche pour les six prochaines années dans cette ville qui est en même temps un département. Il pourra donc compter aussi sur les projets du régime de la rupture pour le Littoral, lui à qui la ville de Cotonou semblait destinée des mois avant les élections. Si la presse a été longtemps élogieuse sur son bilan à Bohicon, la gestion de Cotonou s’avère plus complexe. Les habitants de la capitale économique, la vitrine du Bénin, ont des attentes plus grandes que celles de Bohicon, sans insulte par ailleurs aux populations de Bohicon. Une longue coupure de courant, des caniveaux non curés, des kilomètres de rues sans éclairage exposent plus la ville de Cotonou, le Bénin avec.
En attendant de traduire dans les actes la vision qu’il a pour Cotonou, le prochain test de Luc Atrokpo va se dévoiler aussi tôt qu’adviendront les premiers signes d’impatience de ses administrés. Le toujours président de l’Association nationale des communes du Bénin (ANCB) doit dans l’immédiat gérer une marche, visiblement une manifestation de femmes plutôt contre la gestion de Patrice Talon. Une marche de protestation, moment de tous les imprévus avec des possibilités de dérapages, des casses et donc tous les Béninois retiennent leur souffle, tant l’occasion sera la première pour le duo intérimaire – nouveau maire. Et puis, il y a la Covid-19. La marche du samedi 31 semble prendre pour point de chute les marchés. Sa réussite sans dérapages est aussi la responsabilité du maire de Cotonou. Luc Atrokpo sait qu’il n’en est qu’à son premier test si cette marche se tient. La ville de Cotonou, mieux que Bohicon située à plus de 120 kilomètres de là, est plus attractive pour les marches. Nous sommes à moins de six mois du scrutin présidentiel, moment propice pour des marches de différents acteurs. Luc Atrokpo devra gérer tout ça, quitte parfois à se fâcher avec le pouvoir qui lui a enlevé les épines sur la route Bohicon – Akassato – Cotonou.