Suivant les dispositions de la Loi n° 2019-43 du 15 novembre 2019 portant code électoral du Bénin et de la Jurisprudence de la Cour Suprême et suivant les considérations légales entrant en ligne de compte pour l’attribution des sièges au sein d’un arrondissement, circonscription électorale, Franck Kinninvo, Expert en décentralisation nous fait une lecture croisée de la loi. De son explication, il ressort ce à quoi doivent s’attendre les différentes formations engagées.
Voici comment les sièges seront attribués.
1- Participation à l’attribution de sièges à travers l’obtention d’au moins 10% des suffrages valablement exprimés au niveau national.
Dans ce développement, nous les appellerons les listes agréées. En effet, selon l’article 184 de la Loi n° 2019-43 du 15 novembre 2019 portant code électoral du Bénin, « Seules les listes ayant recueilli au moins 10% des suffrages valablement exprimés au plan national, sont éligibles à l’attribution des sièges ». Les 10% au niveau national sont calculés sur la base, non pas du nombre d’inscrits ou du nombre de votant, mais en référence au nombre de votants diminués des bulletins nuls. Il faut donc connaître le nombre de votant et le nombre de bulletins nuls pour calculer le chiffre dont les 10% constitueraient le seuil de représentativité nationale. Ainsi donc, une liste (un parti politique) peut venir en tête ou obtenir la majorité absolue dans plusieurs arrondissements sans pouvoir se faire attribuer le moindre siège dans les 546 arrondissements du pays.
2- Le cas des arrondissements à un siège
Le siège est attribué au candidat ayant obtenu le plus de suffrages exprimés et appartenant à l’une des listes ayant rempli la condition des 10% au niveau national. Ce cas est régi par l’article 187.6 du Code électoral : « Dans les circonscriptions électorales comptant un siège, les membres du Conseil communal ou municipal sont élus au suffrage universel direct au scrutin uninominal majoritaire à un tour. Dans ce cas, le candidat qui a obtenu le plus de suffrages exprimés est proclamé élu ».
3- Le cas des arrondissements à plusieurs sièges
Variante N°1 : Une liste « agréée au niveau nationale » obtient la majorité absolue des suffrages valablement exprimés ou à défaut plus de 40% des suffrages valablement exprimés (La prime majoritaire).
- Dans ce cas, on fait une première attribution de la majorité absolue des sièges à pourvoir (moitié plus un) à cette liste.
- Au cas où deux listes agréées obtiendraient plus de 40% des suffrages valablement exprimés, l’attribution de la majorité absolue des sièges reviendra à la liste à la liste ayant obtenu le plus fort suffrage.
- Après l’attribution de la majorité absolue des sièges, le reste des sièges à pourvoir est répartie entre toutes les listes agréées à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne à l’exclusion des listes ayant obtenu moins de dix pour cent (10%) des suffrages exprimés. C’est à ce niveau qu’intervient la deuxième règle des 10%, seuil de représentativité au niveau local, après celle des 10% au niveau national. Toutes les listes, y compris celles agréées au niveau national, n’ayant pas obtenu les 10% des suffrages valablement exprimés au niveau de l’arrondissement sont exclues de la répartition des sièges restants.
4- Le cas des arrondissements à plusieurs sièges.
Aucune liste « agréée au niveau nationale » n’obtient la majorité absolue des suffrages valablement exprimés ni les 40% des suffrages valablement exprimés.
Les sièges à pourvoir sont répartis entre toutes les listes agréées à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne à l’exclusion des listes ayant obtenu moins de dix pour cent (10%) des suffrages exprimés. Au cas où, aucune liste n’obtiendrait les 10% des suffrages valablement exprimés au niveau de l’arrondissement, la CENA ne pourra pas attribuer les sièges restants. Du coup, les élections seront reprises dans cet arrondissement. Normalement, cette reprise se ferait avec les seules listes agréées au niveau national, même si les textes et la jurisprudence sont encore muets sur cette question. L’interprétation de la CENA est attendue.
5- La représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne
Le mode de scrutin proportionnel plurinominal ou représentation proportionnelle à scrutin de liste est un système électoral où le nombre de sièges à pourvoir est partagé en fonction du nombre de voix recueillies. Pour répartir les sièges entre les différentes listes, il faut d’abord déterminer le quotient électoral qui s’obtient en divisant le total des suffrages exprimés par le nombre de sièges à pourvoir. Ainsi, chaque liste obtient autant de sièges que son score contiendra de quotient électoral.
C’est à ce niveau que la Cour Suprême intervient dans son Arrêt 2020-01 du 18 février 2020. Dans une première interprétation, la CENA avait retenu de soustraire les suffrages valablement exprimés aux listes qui n’auraient pas obtenu ces fameux 10% dans l’attribution des sièges, notamment le calcul du quotient électoral permettant de calculer le nombre de voix nécessaires pour se voir attribuer un siège. Selon la Cour, si cette interprétation était retenue, elle conduirait à « annihiler » les suffrages des électeurs recueillis par lesdites listes, ce qui serait un « dévoiement de l’esprit du Code électoral de nature à amener la CENA à annuler ou à écarter des suffrages exprimés, toute chose dont elle n’a ni la compétence ni le pouvoir ». Le juge électoral s’est également appuyé sur l’article 3 de la constitution pour conforter son interprétation.
Avec le quotient électoral, tous les sièges ne sont pas attribués. Le reste des sièges est attribué, tour à tour à la plus forte moyenne qui s’obtient en divisant le nombre de suffrage obtenu par chaque liste par le nombre de siège attribué avec le quotient électoral plus le chiffre un (1).
Franck S. KINNINVO
Expert en Communication et en Décentralisation